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FR
Bonjour, l’article est extrêmement intéressant et un bon point de départ en effet pour une discussion riche sur le modèle Diamant pour les livres. Je partage ici quelques réflexions que ce texte m’inspire à chaud. Mes remarques doivent être lues comme une critique constructive destinée à faire avancer le débat.
Tout d’abord, une bonne part de l’article repose sur une analyse des 6 critères opérationnels définis dans le cadre du projet Craft-OA et que nous utilisons comme critère de sélection pour l’inclusion des revues dans le Diamond Discovey Hub. Il est très important de comprendre (et j’ai l’mpression que c’est un peu oublié quelquefois par les auteurs de l’article), que les 6 critères ne sont pas des critères de qualité. Il faut les prendre comme des critères purement classificatoires permettant de déterminer si une revue est Diamant ou non (selon nos critères) mais ne disant rien de la qualité de la revue (ce travail est plutôt pour le DOAJ). Donc, lorsque nous disons qu’une revue doit avoir un ISSN c’est simplement pour pouvoir dire “c’est une revue” (autrement dit une publication en série). La question qu’il faut se poser pour les livres est : qu’est-ce qui permet d’affirmer que cet objet est un livre (sans se prononcer sur la qualité du livre ni sans rien dire sur le système d’identification souhaitable). Ici, on pourrait dire : ISBN, DOI ou tout autre système d’identification qui identifie les objets éditoriaux comme des livres.
La même remarque vaut pour plusieurs autres critères : mode d’évaluation par les pairs, licence ouverte : Nous ne disons rien de ce qui est le mieux pour les revues. Nous disons simplement que pour qu’une revue soit considérée comme scientifique ou savante, il faut qu’elle ait une pratique d’évaluation par les pairs, quelle qu’elle soit (et même si c’est une pratique questionnable). Il en va de même pour les licences : jamais il n’est dit dans les 6 critères que CC-BY est préférable. Il y a une multitude de licences ouvertes et nous n’entrons pas dans le débat compliqué de savoir quelle est la “meilleure” licence ou celle qui “vraiment ouverte”. Nous sommes agnotiques sur la question à cet endroit et je pense qu’il doit en être de même pour les livres.
Nous arrivons au premier point vraiment difficile : la publication non soumise à condition de paiement (APC/BPC) ou d’affiliation. La vraie difficulté tient à la notion de publication en série justement : dans le cas d’une revue, comme la revue publie des articles en série, elle doit établir une politique d’acceptation des manuscrits qui s’applique uniformément à tous les manuscrits qu’elle reçoit. D’où la facilité à caractériser si une revue conditionne la publication des articles au paiement d’APC ou à l’affiliation des auteurs. Dans le cas des livres, c’est beaucoup plus diffiicile à établir car chaque livre est une projet unique en soi. Il y a beaucoup d’éditeurs commerciaux de grande taille qui ne sont clairement pas Diamant car ils ont des politiques établies de publication d’ouvrages soumis à condition de paiement de BPC. Mais il y a beaucoup d’éditeurs de petite taille qui travaillent avec leurs auteurs à aller chercher ensemble des financements pour rendre possible la publication de l’ouvrage. A l’arrivée, l’auteur a bien contribué au coût de réalisation de l’ouvrage et sans doute que sans cet apport, la publication dee l’ouvrage n’aurait pas été possible. Mais peut-on appeler cela des BPC comme on parle d’APC ? Difficile à dire. Il faut travailler cette question uatour de la notion d’explicite ou implicite, de règle et de cas par cas.
Je termine sur le dernier critère : la propriété du titre par la communauté scientifique, qui pose d’ailleurs la question plus générale du niveau de granularité pertinent. En fait, pour moi cette question doit être traduite en question de politique éditoriale. De manière générique, nous pourrions poser la question suivante : à l’'endroit où se définit une politique éditoriale, est-on certain que cette politique éditoriale est définie conformément aux besoins de structuration des connaissances de la communauté scientifique et non pour satisfaire à d’autres considérations, comme la rentabilité commerciale par exemple (ou, d’ailleurs, puisque c’est d’actualité, à des injonctions politiques ou idéologiques). Pour la revue, le moyen le plus simple et le plus concret que l’on ait trouvé est de déterminer que le titre est propriété d’une entité dont la mission est scientifique. Mon expérience de l’édition de livres savants et que c’est au niveau de la collection de livres qu’une politique éditoriale réellement indépendante peut s’établir. Mais je suis d’accord que ce niveau est plus faible que son équivalent revue car la formalisation juridique de ce niveau est encore plus souvent inxistante pour les collections de livres que pour les revues. Autrement dit, la où avec la revue, on peut s’appuyer sur l’appareil juridique de la propriété intellectuelle et du droit des marques pour verrouiller la souveraineté scientifique sur la publication, c’esdt beaucoup plus difficile pour les livres. Mais cela me conduit à une remarque finale : je conçois bien que beaucoup d’éditeurs savants publient beaucoup de livres “hors collection” et que ce n’est pas une mauvaise pratique en soi. Pour autant, il me semble que dans ce cas, la relation qui s’établit entre l’auteur et l’éditeur, sur la base de l’interpersonnel est assez particulière et sujette à discussion par rapport à l’ethos scientifique qui est de construire des collectifs de production de savoirs. La relation de un à un entre l’éditeur et son auteur est-elle vraiment équilibrée ? L’est-elle autant que dans le cas de la publication d’un livre dans une collection dotée de son propre comité éditorial par exemple ? Discussion à suivre…
EN
Hello, the article is extremely interesting and indeed a good starting point for a rich discussion on the Diamond model for books. I’d like to share some immediate thoughts that this text inspires in me. My remarks should be read as constructive criticism aimed at advancing the debate.
First of all, a good part of the article relies on an analysis of the 6 operational criteria defined within the framework of the Craft-OA project, which we use as selection criteria for the inclusion of journals in the Diamond Discovery Hub. It’s very important to understand (and I have the impression that this is sometimes overlooked by the authors of the article) that these 6 criteria are not quality criteria. They should be taken as purely classificatory criteria allowing us to determine whether a journal is Diamond or not (according to our criteria), but saying nothing about the quality of the journal (that work is more for DOAJ). So, when we say that a journal must have an ISSN, it’s simply to be able to say “it’s a journal” (in other words, a serial publication). The question to ask for books is: what allows us to affirm that this object is a book (without making a judgment on the book’s quality or saying anything about the desirable identification system)? Here, we could say: ISBN, DOI, or any other identification system that identifies editorial objects as books.
The same remark applies to several other criteria: peer review method, open license. We don’t say what is best for journals. We simply say that for a journal to be considered scientific or scholarly, it must have a peer review practice, whatever it may be (even if it’s a questionable practice). The same applies to licenses: the 6 criteria never state that CC-BY is preferable. There are a multitude of open licenses, and we don’t enter into the complicated debate of knowing which is the “best” license or which is “truly open.” We are agnostic on this issue at this point, and I think it should be the same for books.
We arrive at the first really difficult point: publication not subject to payment (APC/BPC) or affiliation. The real difficulty lies precisely in the notion of serial publication: in the case of a journal, since the journal publishes articles in series, it must establish a manuscript acceptance policy that applies uniformly to all manuscripts it receives. Hence the ease of characterizing whether a journal conditions the publication of articles on the payment of APCs or on author affiliation. In the case of books, it is much more difficult to establish because each book is a unique project in itself. There are many large commercial publishers who are clearly not Diamond because they have established policies for publishing works conditional on BPC payment. But there are many small publishers who work with their authors to jointly seek funding to make the publication of the work possible. In the end, the author has indeed contributed to the cost of producing the work, and undoubtedly without this contribution, the publication of the work would not have been possible. But can we call this BPCs, as we speak of APCs? Difficult to say. This question needs to be explored around the notion of explicit or implicit, of rule versus case-by-case.
I’ll conclude with the last criterion: ownership of the title by the scientific community, which also raises the more general question of the relevant level of granularity. In fact, for me, this question should be translated into a question of editorial policy. Generically, we could ask the following question: at the point where an editorial policy is defined, are we certain that this editorial policy is defined in accordance with the knowledge structuring needs of the scientific community and not to satisfy other considerations, such as commercial profitability, for example (or, for that matter, since it is topical, political or ideological injunctions)? For journals, the simplest and most concrete means we have found is to determine that the title is owned by an entity whose mission is scientific. My experience in scholarly book publishing is that a truly independent editorial policy can be established at the book collection level. But I agree that this level is weaker than its journal equivalent because the legal formalization of this level is even more often nonexistent for book collections than for journals. In other words, while with journals we can rely on the legal apparatus of intellectual property and trademark law to lock in scientific sovereignty over the publication, it is much more difficult for books. But this leads me to a final remark: I fully understand that many scholarly publishers publish many “out-of-collection” books, and that this is not a bad practice in itself. However, it seems to me that in this case, the relationship established between the author and the publisher, based on the interpersonal, is quite particular and open to discussion in relation to the scientific ethos of building collectives for knowledge production. Is the one-to-one relationship between the publisher and their author truly balanced? Is it as balanced as in the case of publishing a book in a collection with its own editorial board, for example? Discussion to be continued…